Faut-il attendre d'aller vraiment mal pour consulter ? Après tout, la souffrance ne fait-elle pas partie de la vie ? Et si on n'a pas eu une enfance maltraitante, est-ce qu'on a vraiment besoin de consulter ? Bref, à partir de quand on consulte un psy ?
"Je suis pas venue pour souffrir, okay ?!" Meryem Croft
Personne n'a envie de souffrir (ou presque personne). En soi ce n'est pas une expérience que nous trouvons agréable. Pourtant, on s'accommode très bien de tas de petites ou grandes souffrances sans s'en rendre compte. Parce qu'elles sont vues comme inéluctables, ou normales, ou nécessaires. Souvent notre entourage nous dit :
"Faut faire avec. C'est la vie. On va pas se plaindre..." et d'autres expressions de cette sorte.
Mais, à partir de quand ai-je le droit de me plaindre vraiment ? A partir de quand est-ce légitime de trouver que cette souffrance est trop grande pour moi ? A partir de quand je peux demander de l'aide pour soulager ma souffrance petite ou grande ?
La souffrance est subjective
Vous avez sans doute constaté que chaque personne a sa propre sensibilité. Telle parole va particulièrement vous toucher, là où elle n'aura aucun effet sur votre voisin. Nous sommes ainsi fait que nous percevons le monde qui nous entoure et nos relations aux autres, avec notre propre sensibilité.
C'est pourquoi la sensibilité à la souffrance est également différente pour chacun. Vous savez ? Cette échelle de 1 à 10 sur laquelle votre médecin vous demande de vous situer parfois par rapport à votre niveau de douleur ?, avant de décider d'un traitement, car personne mieux que vous ne peut dire à quel point vous souffrez.
C'est pourquoi, dans le domaine des soins psychiques, on ne peut pas minimiser une souffrance, aussi insignifiante soit elle. Car si elle est ressentie comme telle par la personne, alors elle est à prendre en compte. Votre souffrance petite ou grande vous dit quelque chose. Ecoutons-la ensemble.
C'est ici qu'il convient de distinguer DOULEUR* et SOUFFRANCE*. Ces deux termes existent car il y a une distinction à faire entre une douleur, le fait d'avoir mal et une souffrance, le fait de souffrir. Une douleur n'entraîne pas nécessairement une souffrance. En revanche la souffrance s'installe lorsque la douleur est durable, sans possibilité de soulagement présent ou futur. La douleur est supportable si elle n'est pas à son paroxysme. Par exemple les douleurs de l'accouchement ne sont pas ressenties par toutes les femmes comme une souffrance. Elles passent et accompagnent une étape de la vie nécessaire, mais elles ne détruisent pas.
La souffrance, c'est le fait d'avoir mal, de souffrir, sans but, sans que cette douleur ait du sens ou qu'elle puisse être apaisée. La souffrance n'a pas de perspective, d'issue, d'espoir de s'en tirer. Les soins médicaux soulagent les douleurs, et prennent soin des souffrances. Mais la souffrance ne se soigne pas avec des médicaments. Elle se soulage par de la présence, des paroles de réconfort, une écoute bienveillante et compréhensive, une perspective d'avenir.
Y a t'il des symptômes caractéristiques ?
N'attendez pas d'aller vraiment mal pour consulter...
Je dirais, tout sentiment de mal-être récurrent, envahissant, même si cela reste ponctuel. Tout constat que votre vie stagne et ne va pas dans le sens que vous souhaiteriez. Toute impression qu'il y a quelque chose qui cloche chez vous ou qui vous échappe et qui vous cause des problèmes au quotidien, alors que matériellement ou humainement il n'y a pas de raisons que cela aille mal. Ou bien lorsque vous voyez que quelque chose de malheureux ou négatif se reproduit régulièrement dans votre vie et que vous souhaitez que cela cesse.
Et enfin, lorsque la souffrance que vous portez vous pèse.
La bonne nouvelle c'est que vous n'êtes pas condamnés à souffrir ou à subir votre vie. Non, il n'est pas normal de se sentir mal au quotidien, dans ses relations, dans son travail ou dans les événements de la vie de tous les jours. Ce n'est pas "juste une question de personnalité ou de caractère", c'est le passé qui s'invite chez vous et vient empoisonner votre présent.
Sans parler bien sûr des maux tels que : la dépression, les phobies, les angoisses, les addictions, les traumatismes, les deuils, les burn outs... qui sont des souffrances plus visibles, certaines souffrances sont invisibles et n'en sont pas moins encombrantes et délétères. N'attendez pas d'aller vraiment mal pour consulter, il vous faudra d'autant plus de temps pour vous en remettre et remonter la pente.
Est-ce que consulter un Psy va vraiment changer quelque chose ?
OUI ! Sinon je ne pratiquerais pas ce métier.
La vie est trop belle pour être vécue dans la souffrance.
Et surtout, je me suis moi-même posée cette question. J'ai cherché longtemps une thérapie, un thérapeute, qui pourrait réellement m'aider à aller mieux. Moi aussi, je n'y croyais pas trop au fond. Et puis, à force de chercher, j'ai trouvé un thérapeute et une forme de thérapie efficace, décapante et profondément humaine. J'ai alors pu me connecter à mon vrai "moi" (comme dirait Freud) et j'ai "lâché un peu le mental". Alors, oui, j'ai trouvé un chemin de renaissance que je n'espérais plus. J'ai retrouvé le goût de vivre et plus encore ! J'ai découvert que la vie vaut vraiment la peine et que la souffrance n'est pas inéluctable, quel que soit notre passé.
Aujourd'hui, je peux témoigner que cela est possible. Il est possible d'aller réellement mieux. Il est possible de mener la vie qu'on souhaite. Avec les hauts et les bas de l'existence, mais sans que les bas ne m'entraînent au 36eme dessous ou me détruisent à petit feu. Il est possible de VIVRE vraiment et d'être heureux. Mais cela demande un certain courage. Celui de se regarder en face et d'aller regarder là où ça fait mal. Là où l'on n'a pas très envie d'aller. Celui d'oser s'avouer incapable de faire le chemin par soi-même. Celui de demander une aide et de reconnaître qu'on en a besoin.
Si mon travail n'avait aucun résultat dans la vie des personnes, si les changements devaient prendre des années et se mesurer au millimètre, alors je changerais de métier. Je déteste perdre mon temps et faire perdre leur temps aux autres. La vie est trop belle pour être vécue dans la souffrance.
Alors, oui un Psychologue peut vraiment vous aider à aller mieux. Encore faut-il trouver la bonne personne et une thérapie réellement efficace. Ne perdez pas votre temps !
* Définition Douleur : "la douleur est une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable, associée à une lésion tissulaire réelle ou potentielle, ou décrite dans ces termes". Source : https://www.inserm.fr/information-en-sante/dossiers-information/douleur consulté le 02/03/2021.
* Définition Souffrance : "Fait de souffrir, état prolongé de douleur physique ou morale". Source : https://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/souffrance/73633 Consulté le 02/03/2021.
Pour aller plus loin :
- Souffrance et douleur, Emmanuelle Gilloots, Dans Gestalt 2006/1 (no 30), pages 23 à 32. https://www.cairn.info/revue-gestalt-2006-1-page-23.htm
- Souffrance, Marie-André Vigil-Ripoche, Dans Les concepts en sciences infirmières (2012), pages 283 à 285. https://www.cairn.info/concepts-en-sciences-infirmieres-2eme-edition--9782953331134-page-283.htm
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