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Mon Psy est-il un parent de substitution ?

Dernière mise à jour : 27 févr. 2023

Quand lien d'attachement et lien thérapeutique se mélangent, le Psy peut faire office de parent de substitution. Est-ce grave Docteur ?





Le statut du Psychologue, en tant que professionnel de la santé mentale, lui donne une image quelque peu paternelle ou maternelle vis-à-vis de ses patients. Pourquoi ? Parce que vous abordez avec lui des questions profondes et personnelles. Vos rêves, vos blessures cachées, vos fantasmes, vos espoirs et vos désespoirs, vos souffrances, lui dévoilant un peu de votre vulnérabilité. De son côté, il est là pour vous rassurer, vous soutenir, vous écouter, vous comprendre, vous accueillir tel que vous êtes, un peu à l'image d'un parent idéal. Vous lui faîtes confiance et sa parole compte lorsque vous vous sentez perdu-e...


Est-ce normal cette relation parent/enfant ? Est-ce bénéfique dans le lien thérapeutique ? Faut-il au contraire l'éviter ?


Quel que soit notre âge, nous avons de besoin de soin et d'attachement.

Oui, c'est tout à fait normal. Comme avec votre médecin, votre ostéopathe ou votre infirmier, car il sont dans une relation de "caregiving*" avec vous. Autrement dit ils prennent soin de vous et de l'enfant en vous, comme un parent pourrait le faire si vous étiez encore enfant. En psychologie, le "caregiving" désigne les besoins d'attachement de l'enfant (cf. théorie de l'attachement de John BOWLBY, 1958). Ces besoins là sont PRIMORDIAUX pour son développement. Autrement dit, c'est dans la mesure où votre attachement affectif envers vos parents ou vos figures d'attachement a été sécurisant, que vous pouvez vous développer et grandir sereinement. Quel que soit notre âge, nous avons besoin de soin et d'attachement. Les professionnels de santé nous en donnent en partie, nos proches aussi. Surtout dans les périodes de la vie où nous sommes les plus vulnérables : petite enfance et vieillesse, maladies. Mais pas que...


"Un parent de substitution ? Est-ce que je risque de devenir dépendant de mon Psy ?"


Je vous vois venir, avec un titre pareil, j'ai sans doute éveillé votre curiosité. On parle de parent de substitution lorsque nos parents n'ont pas répondu à tous nos besoins (et ils sont nombreux, car il est difficile de répondre à tous les besoins d'un enfant, il y a forcément des lacunes quelque part et c'est normal) ou bien parce qu'ils sont absents/décédés et que certains besoins nécessitent d'être comblés. Parfois cette absence ou cette réponse inadéquate a laissé une blessure d'abandon ou un manque affectif. C'est ce qui constitue le lit des relations de dépendance.


Le Psychologue, s'il a bien compris son rôle, est là pour vivre ce transfert* avec vous. Sa présence rappelle au patient son parent ou le parent qu'il aurait voulu avoir. A travers cette relation de confiance qui se tisse, le patient peut se connecter avec son vécu d'enfant, son vécu traumatique, ou son vécu de manque et tisser une nouvelle relation d'attachement. A noter que le fameux "transfert" en Psychologie n'est pas toujours paternel ou maternel, il peut être amical, fraternel... selon les personnes et les phases de la vie. Toutefois, en général, il implique l'histoire inconsciente du patient et de ses premières expériences d'attachement avec les personnes qui ont été les plus importantes dans cette histoire. Soit par leur absence, soit par leur présence.

Il est donc normal de chercher et de trouver d'autres figures d'attachement qui nous apportent du contact et de la disponibilité à tous les âges de la vie.

Par ailleurs, il y a "dépendance" au sens négatif, lorsque les relations sont asymétriques et que l'un demande quelque chose que l'autre n'a pas pour mission de lui donner. Attendre d'un conjoint qu'il soit notre parent est impossible. Attendre de notre enfant qu'il prenne soin de nous n'est pas normal non plus. En revanche, la dépendance de l'enfant envers son parent est normale et naturelle. Il ne peut pas se débrouiller seul et exister par lui-même. Il a besoin de s'attacher et d'être pris en charge entièrement, AVANT de pouvoir se détacher à son rythme.

Le Psychologue est là pour apporter à l'enfant en nous réassurance et accueil. Il est donc à sa place dans une relation de "reparentage" temporaire. En vue que nous accédions plus tard à l'autonomie. Il est normal de chercher et de trouver d'autres figures d'attachement qui nous apportent du contact et de la disponibilité, et ce à tout âge de la vie. C'est notamment lorsque les figures d'attachement font défaut que nous devenons dépendant. Et pas lorsqu'elles sont bien investies auprès de nous.


Redevenir enfant pour pouvoir grandir et se libérer


Avant d'accéder à une maturité affective et à une réelle autonomie (...) nous avons besoin d'être rassuré dans nos liens d'attachement

La démarche thérapeutique entraîne une forme de régression chez l'adulte. Il se retrouve à nouveau comme un enfant face à son parent. L'enjeu est alors de recréer un lien d'attachement sur des bases solides et saines, en respectant la liberté des deux protagonistes. Le but est que l'enfant en nous puisse se trouver suffisamment sécurisé dans ce nouveau lien d'attachement, pour réparer son expérience d'attachement passée et décider de grandir et d'accéder au monde adulte avec la certitude qu'il n'est plus seul à prendre soin de lui-même.


Vous avez sans doute remarqué qu'en situation d'examen (médical, universitaire, professionnel) vous avez l'impression de redevenir un enfant face à son professeur ? C'est le signe du transfert qui se joue avec toute figure d'autorité, comme l'ont été nos parents.

Il en est de même avec votre thérapeute. Vous allez pouvoir "rejouer" votre vécu d'enfant et prendre le risque à nouveau de la relation de confiance, avec un professionnel sensé vous comprendre, s'investir relationnellement avec vous et vous donner le temps dont vous avez besoin (pour passer ce foutu examen de la vie ! Je plaisante...) pour grandir affectivement.

Dis comme ça, cela peut vous paraître étrange mais c'est en fait parfaitement naturel et inconscient au départ. Et c'est le chemin, lorsqu'on trouve un thérapeute en bonne santé psychique et capable d'accepter ce rôle, pour se libérer du passé et se reconstruire. Le thérapeute est de passage dans une vie, pour que la personne puisse devenir autonome à son tour. Avant d'accéder à une maturité affective et à une réelle autonomie (je deviens capable de prendre soin de moi), et bien nous avons besoin d'être rassuré dans nos liens d'attachement, afin de pouvoir nous détacher pour grandir.


{A suivre... un futur article sur l'attachement.}


 

* L’attachement est un type spécifique de lien appartenant à un ensemble plus vaste de liens que Bowlby et Ainsworth ont désignés par le terme de « liens affectifs ». D’après Ainsworth (1985), le concept d’attachement peut être défini par un ensemble de critères, à savoir : a) il est persistant et non transitoire ; b) il concerne une figure spécifique et reflète le besoin de proximité d’un individu envers un autre ; c) il traite d’une relation émotionnellement significative ; d) l’individu désire maintenir la proximité ou le contact avec cette figure, encore que cela puisse varier en fonction de divers facteurs, comme l’âge, l’état de l’individu ou les conditions du milieu ; e) l’individu sent une certaine perturbation face à une situation de séparation involontaire et surtout quand il désire cette proximité et que cela n’est pas possible ; f) l’individu recherche de sécurité et de réconfort dans la relation avec cette personne. Ce dernier critère est déterminant pour la distinction entre « liens parentaux » et « attachement des enfants aux parents » (Cassidy, 1999). (https://www.cairn.info/revue-devenir-2007-2-page-151.htm#no5, consulté le 30/11/2020)



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